samedi 17 juin 2017

A Saint-Tropez, une belle "dernière" pour Jean-Paul Monery au musée de l'Annonciade



Chacun a sa madeleine de Proust. La nôtre se nomme Saint-Tropez. Tous les souvenirs d’enfance et de jeunesse sont là – enfin ceux des grandes vacances, les seuls qui restent durablement en mémoire. Tout n’était que joie, distractions agréables, soleil permanent, partie de tennis sur courts en terre battue, plages où l’on passait une grande partie de son temps.

 

Saint-Tropez avait un charme fou, et une population folle. On s’y amusait.
Choses et Vachon faisaient la mode de l’été. On appréciait les tartares au Gorille, il était déjà difficile de trouver une chaise rouge chez Sénéquier. On achetait les journaux sur le port, à la Maison de la Presse, et les livres chez la libraire de l’étroite rue Clémenceau. On dînait place des Lices, au milieu d’inconnus ou de gens célèbres…

Bleu, blanc, rouge, devant Sénéquier
















Mais Saint-Tropez, c’est aussi – en cela rien n’a changé – le musée de l’Annonciade. Impensable de venir ici  – deux heures, deux jours ou deux mois – sans s’y arrêter. Installé dans une ancienne chapelle, à l’entrée du port, un peu en retrait, il a bénéficié depuis sa création de nombreuses donations à commencer par celle du collectionneur Georges Grammont, amateur de toiles fauves, nabis et divisionnistes. Où mieux qu’à l’Annonciade peut-on voir les œuvres de Signac, Bonnard, Vuillard, Maillol, Matisse, Marquet, Derain, Vlaminck, Van Dongen… ? Depuis Grammont, grâce à d’autres dons, mais aussi à des achats pertinents, soutenus par la commune, ce musée compte l’une des plus belles collections d’art moderne de France. Il faut donc un conservateur amoureux de cette période artistique, et capable de la mettre en valeur. Ce fut le cas ces dernières années, grâce à l’œil, aux connaissances, et à « l’amour de l’art » du conservateur Jean-Paul Monery, qui vient de signer sa dernière exposition, après vingt-six années mises au profit du rayonnement de la ville de Saint-Tropez, via son musée municipal.

Jean-Paul Monery dans le jardin du musée de l'Annonciade, 10 juin 2017

En septembre 1991, après le musée de Grenoble, Jean-Paul Monery prit les fonctions du musée de l’Annonciade. Il étudia, comme il se doit, les collections dont il avait la charge, et consacra sa première exposition à Paul Signac, qui avait découvert la cité varoise cent ans auparavant. Après cette entrée en matière, qui rendait hommage au plus célèbre des artistes tropéziens d’adoption, il continua à proposer aux autochtones, mais aussi aux touristes amateurs d’art venant du monde entier, des expositions, souvent monographiques, qui mirent en avant le travail de chacun des peintres de la collection du musée. Monter ces expositions aura demandé un travail acharné, ce qu’accomplit Jean-Paul Monery avec le sourire, et toujours une aisance apparente. Vingt-six ans conservateur au musée de l’Annonciade, une cinquantaine d’expositions organisées, presque autant de catalogues publiés, n’est-ce pas là une tâche accomplie qui mérite une Légion d’honneur ? Pour nous, si !

Le musée de l'Annonciade, Saint-Tropez


Le samedi 10 juin 2017 eut lieu l’inauguration de la dernière exposition organisée par Jean-Paul Monery : 

« Georges Braque et Henri Laurens, quarante années d’amitié ».

A 12 h 30, devant l’entrée du musée, le maire de la ville, Jean-Pierre Tuvéri, lut un discours consacré au peintre Braque et au sculpteur Laurens. Après cette entrée en matière, il eut surtout des mots très amicaux et reconnaissants envers « son » conservateur qui quittait la place pour la laisser à son successeur, fin septembre. Le maire démontra combien ce conservateur avait marqué la ville de son empreinte. Puis, Jean-Paul Monery prit la parole pour expliquer, avec brio et émotion, son ultime accrochage. La foule, attentive, gagna ensuite l’intérieur du musée pour découvrir les toiles et les bronzes des deux maîtres.

Henri Laurens, Femme à l'éventail, 1919

Georges Braque, Nature morte cubiste, 1921

Henri Laurens, La Nuit, 1943

Georges Braque, Etude pour le plafond du Louvre, 1953


L’accrochage des peintures et la présentation des sculptures montrent une subtile alchimie entre les œuvres, qui se mettent en valeur l’une l’autre. La présentation est parfaite, limpide, évidente. Pour qui aime ces deux artistes, l’émotion est grande. Nul doute que Braque comme Laurens auraient été heureux de cette « rencontre » entre leurs travaux !

Quand Braque rencontre Laurens...

Une belle exposition n’est vraiment belle que si un beau catalogue l’accompagne. Sinon, une fois décrochée, plus rien n’a existé – ou presque. Tout n’était que rêve. Là, le rêve se prolonge grâce au catalogue de grand format, dans lequel une soixantaine d’œuvres sont bien reproduites. Un texte préliminaire permet d’appréhender ces quatre décennies d’amitié. En fin d’ouvrage, un tableau chronologique montre, en parallèle, la vie et la création de Georges Braque et d’Henri Laurens, depuis leur naissance jusqu’à leur décès. Une « Histoire de l’art » en soi. Une iconographie en sépia nous plonge dans l’époque et nous place aux côtés des deux grands hommes.

Catalogue de l'exposition Georges Braque et Henri Laurens, L'Annonciade, musée de Saint-Tropez, 2017


Après cette belle « dernière », il reste à Jean-Paul Monery à profiter de la vie, avec notamment sa famille et ses nombreux amis. On sait aussi que la visite d’expositions d’art contemporain sera à son programme – c’est un grand amateur – tout comme la lecture de beaux textes, et peut-être même l’écriture d’un ouvrage, dont le titre serait : « J’ai été conservateur du musée de Saint-Tropez ».


« Georges Braque et Henri Laurens, quarante années d’amitié »

Du 10 juin au 8 octobre 2017

Musée de l’Annonciade, Saint-Tropez

Tous les jours, sauf le lundi

Téléphone : 04 94 17 84 10

Catalogue : 25 €.


 


Galerie SR

16, rue de Tocqueville

75017 Paris

01 40 54 90 17



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